Le nouvel orgue de l’église Saint-Justin de Levallois-Perret

Il est important de se rattacher à un style même dans la construction d’un nouvel orgue et c’est pourquoi notre projet se réfère, entre autre, à un instrument que nous connaissons bien, celui de Stavelot réalisé par Korfmacher en 1841, dont la restauration a été réalisée par les atelier Thomas.

Cela fut l’occasion pour nous d’étudier en détail tout ce qui se rapportait au travail du facteur de Linnich, bien sûr, mais aussi de nous intéresser aux autres grands artisans de cette région bien caractéristique (Müller, Maass, König, Stumm, en ce qui concerne les allemands, Clérinx, Graindorge, Peereboom etc. pour les facteurs d’orgues du côté francophone). Deux grandes particularités sont ici à mettre en évidence :

  • Un style d’orgue typique d’un territoire frontalier, oscillant entre la culture latine et la culture germanique (outre une spécificité irréductible à l’une comme à l’autre).
  • L’entrée de l’orgue par la grande porte dans l’époque romantique qui bat son plein, avec les plus grands noms, depuis Berlioz et Chopin jusqu’à Mendelssohn et Schumann, et avec toute sa complexité, depuis les survivances nostalgiques et appuyées des époques passées jusqu’aux recherches les plus audacieuses de l’expression des sentiments.

Ce nouvel orgue a donc comme ossature un orgue inspiré du style romantique rhénan. La rondeur, la poésie et le caractère chantant de chaque sonorité de ces instruments s’adaptent à merveille à l’acoustique et aide cet instrument à remplir toutes ses fonctions. Les possibilités sans limites de mélanges de registrations sont une autre source d’intérêt, en y incluant, bien entendu, les jeux d’anches, faits pour s’intégrer à toutes les combinaisons, des plus simples jusqu’au Plénum.

C’est donc tout naturellement que nous nous sommes rapproché le plus possible de la magnifique esthétique de Korfmacher, peut-être le meilleur représentant de l’orgue rhénan à son époque tout en ouvrant l’instrument vers les périodes plus anciennes et après la période romantique.

Nous avons tenté d’aller là le plus loin possible dans l’approche d’une cohérence stylistique. Il ne s’agit plus seulement des tailles des tuyaux, mais de la composition de l’ensemble, qui mettra en valeur les répertoires des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles de la manière la plus adéquate. En un mot, la finalité est de redonner tout l’impact et la charge d’émotion avec laquelle elle a pu toucher le cœur de ses auditeurs à l’époque de sa création. C’est ainsi que nous incluons la flûte traversière si typique, tout en favorisant la recherche des sonorités mystérieuses des gambes, la majesté des principaux larges et chantants et la poésie des flûtes, avec une diversité de sonorités de jeux d’anches extrêmement versatiles.

Quant aux mixtures, nous reprenons bien entendu la composition de celles des orgues de cette époque basées sur la quinte 1’ 1/3, qui allient brillance et gravité et conviennent si bien à la musique polyphonique, telle qu’on pouvait la rechercher à nouveau à cette époque de redécouverte de la musique de Jean-Sébastien Bach.

Nous avons cherché une sonorité enveloppante et homogène. Elle sera parfaitement adaptée à l’usage de l’orgue dans ses usages les plus variés.

Photos : ©Zohair Bijaoui et ©Nadège Murez